Dans le cadre de la Semaine nationale de sensibilisation à la sécurité des travailleurs routiers, la section locale 791, la section locale 9, la section locale 717 ainsi que l'AMI ont acheminé une lettre au Ministre de la sécurité publique, François Bonnardel, pour demander le déclenchement automatique d'une enquête publique lors de décès sur les chantiers. Nous vous invitons à en prendre connaissance.
OBJET : DÉCLENCHEMENT SYSTÉMATIQUE D’ENQUÊTES PUBLIQUES LORS DE DÉCÈS SUR LES CHANTIERS – UNE QUESTION D’HUMANITÉ ET DE BON SENS
Lettre Ministre Bonnardel – Déclenchement systématique d’enquêtes publiques lors de décès en chantier – Signée – 13-06-2025Download
Monsieur le Ministre,
Nous vous écrivons au nom des sections locales 9, 717, 791, et de l’AMI, de la FTQ‑Construction, pour vous faire part de nos préoccupations quant à l’importance de tenir des enquêtes publiques à chaque décès sur un chantier de construction.
Nous nous permettons de rappeler que pour un peu plus de 5% de la main d’œuvre totale, nos ouvriers et ouvrières représentent plus de 30% des décès recensés sur les lieux de travail. Nous voyons la Semaine nationale de sensibilisation à la sécurité des travailleurs routiers comme une fenêtre d’opportunité de choix pour vous adresser cette requête.
Un recul silencieux mais profond. Depuis l’adoption d’une nouvelle loi sur les coroners en 1985, ces derniers n’ont plus déclenché d’enquêtes publiques sur les décès en chantier. Nous croyons d’ailleurs qu’il est important de rectifier le tir, le plus rapidement possible. Ce changement a favorisé l’apparition d’une certaine opacité au sein du Bureau du coroner en chef, une rationalisation qui fait en sorte que seuls les rapports des corps policiers et de la CNESST sont considérés lors de la rédaction du rapport d’enquête.
Le cas de Vito Fundaro : nous tirons la sonnette d’alarme. Nous avons, dans le cas du décès d’un jeune ouvrier, M. Vito Fundaro, 26 ans, pulvérisé par une charge s’étant détachée du mât d’une grue au 61e étage du chantier du Square Philips à Montréal l’an passé, demandé une enquête publique. À titre d’exemple pour notre démonstration, les travaux sur le chantier étaient superposés, ce qui est formellement interdit par le Code de sécurité pour les travaux de construction. Le coroner nous a répondu par lettre, après notre demande de déclencher une enquête publique, qu’il n’était pas dans son mandat d’effectuer des modifications règlementaires. Nous le comprenons bien. Or, notre intention n’était pas de faire modifier le règlement, mais plutôt de faire en sorte que les organisations responsables de son application le fassent appliquer, pour protéger des vies humaines. Ce sont des informations stratégiques pour éviter qu’une situation similaire ne se reproduise, et ultimement, pour sauver des vies. Nous sommes donc outrés de cette réaction tiède, et nous croyons que notre sentiment est tout à fait juste : il y a eu mort d’homme. Personne ne devrait perdre sa vie à essayer de la gagner et surtout, nous devrions chercher à bien tracer l’arbre des causes qui mènent à un décès. De simplement dire qu’une poutre est tombée sur la tête d’un travailleur n’est pas suffisant pour apporter des correctifs qui permettront de sauver des vies.
Ce changement de façon de faire crée un bar ouvert pour les employeurs voyous.
Le fait de ne retrouver que des copiés-collés des rapports de police et de celui de la CNESST dans les rapports d’enquête du coroner ouvre toute grande la porte aux employeurs voyous qui tournent les coins ronds, qui ont plusieurs pratiques contraires au Code de sécurité pour les travaux de construction, sur une base journalière, pendant que les autorités ne semblent pas vouloir agir à ce sujet.
Ce que nous demandons. Nous demandons au coroner de faire la lumière sur les décès en chantier avec un outil à sa disposition : l’enquête publique. Personne ne peut rester indifférent aux morts sur les chantiers. Pour que la lumière soit faite sur cette réalité, le coroner doit se faire un devoir d’entendre les différentes parties et de leur permettre de participer aux enquêtes publiques, pour s’assurer que les drames ne se répètent pas. Notre responsabilité collective est de mettre tous les efforts nécessaires pour ne pas que des accidents mortels ne se répètent comme le jour de la marmotte. C’est pourquoi nous demandons aujourd’hui d’être partie prenante aux enquêtes publiques, et d’être ajoutés comme partie intéressée dans les enquêtes. Nous croyons que notre rôle sur les chantiers est important, que ce soit pour signaler des manquements préalablement identifiés, expliquer le fonctionnement de notre industrie ou encore, amener une lumière nouvelle dans le travail du coroner, dans le but de sauver des vies. C’est aussi cela, de la sécurité publique, et surtout, assumer ses responsabilités.
Une opportunité d’agir avec courage. Monsieur le Ministre, en agissant sur ce dossier, vous avez l’occasion de poser un geste fort et humain, en faveur de la sécurité et de la prévention. Nous vous sollicitons donc pour convenir d’une rencontre, en personne ou virtuelle, afin de vous présenter nos propositions plus en détail et d’ouvrir un dialogue constructif autour de ce que nous croyons être un retour à une méthode rigoureuse afin que l’hécatombe sur les chantiers cesse. Dans l’attente de votre réponse, veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments les plus respectueux.
Alexandre Ricard, Président, Directeur général Local 9 Alain Doyle, Directeur général local 717 Jocelyn John, Directeur général AMI Marc Leclerc, Directeur général local 791